Micocoulier Celtis australis
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Le nom a des sonorités étranges. On pourrait croire qu’il s’agit d’un
arbre exotique introduit dans nos contrées par le caprice d’un amateur. Eh bien,
non ! Le micocoulier est là, parmi nous, depuis fort longtemps. En Provence, il
est plus connu sous le nom de falabréguié.
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à l'entrée
de la place du village de Salles-sous-Bois, dans une cour (derrière le Temple)
trône un magnifique micocoulier, grand, fort et généreux en fruits.
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oN A RECENSÉ DE PAR LE MONDE, essentiellement dans les zones tempérées et tropicales, plus de quatre-vingt
espèces de micocouliers. Le notre, c’est le Celtis Antiquité. À en croire Pline
qui vécut au Ier siècle, il y avait à Rome un micocoulier vénérable, planté par Romulus lui-même, le
fondateur de Rome. Ce qui lui donnait l'âge respectable de huit siècles.
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On retrouve au Moyen âge, le micocoulier planté partout dans les villages, les
cours de ferme, les châteaux. Ne dit-on pas que le Roi René légiférait sous un micocoulier ? Il signalait
aussi l'emplacement des chapelles. Au XVIIIe siècle, jardiniers et paysagistes recommandent sa plantation. Car c'est un bel
arbre. Il atteint 20 à 25 mètres de haut. Chose remarquable, son tronc a la
forme d'une patte d'éléphant, et son écorce même, sombre, piquetée de blanc, qui
forme des plis au départ des branches, évoque la peau d'un
pachyderme. Les feuilles, caduques, munies d'un long pétiole, sont ovales, dentelées,
légèrement asymétriques et se terminent par une pointe. La floraison est très
modeste, elle passe presque inaperçue tant les fleurs, dépourvues de pétales,
sont petites. Les fruits, les micocoules, se forment au printemps, petites boules vertes qui
pendent au bout d'un pédoncule comme de petites cerises, solitaires ou par
paires. Elles mûriront tout au long de l'été jusqu'aux gelées. Elles sont
comestibles et faisaient, dit-on, le régal des enfants. .
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D'autant plus que le
noyau, noir et finement côtelé, servait de projectile pour les sarbacanes. De
plus il est rustique, peu regardant à la nature du terrain, très résistant à la
vermine et aux maladies. Sa racine s'enfonce très profondément et le vent n'a
pas trop de prise sur lui. Livré à lui-même, il se ressème
généreusement.
« Alors, tu me la racontes ton histoire ? Je
veux bien te la raconter, mais sous le micocoulier ». Ces quelques vers
populaires expriment bien cette présence familière du micocoulier dans le
paysage du midi.
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Pourtant, cet arbre si bien implanté a été détrôné au
cours du XIXe siècle par le
platane. Le platane déjà connu et admiré dans l'Antiquité est réapparu en force
avec des espèces hybrides. Il a séduit avec son écorce lumineuse, colorée, ses
larges feuilles, son port altier. Le fait qu'il accepte des tailles sévères en a
fait l'arbre idéal pour le réseau routier qu'on a mis en place tout au long du XIXe siècle et pour les larges avenues des nouveaux quartiers
aménagées dans les villes.
Ainsi, à Carpentras, en 1862, l'avenue de la
gare, vitrine de la modernité, est non seulement éclairée par des becs de gaz,
mais aussi ombragée de platanes. Les tenants du micocoulier ont eu beau plaider
pour lui, s'écriant que le platane n'a que son ombre et sa beauté à offrir alors
que le micocoulier, lui, est utile de bien des façons, le platane l'a emporté.
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Si bien que c'est lui qui est devenu le symbole de l'art de
vivre provençal. Or, il est tout à fait vrai que, comme pour le cochon, dans le
micocoulier tout est bon ! Qu'on en juge : son feuillage était apprécié par le
bétail. La décoction des feuilles et des jeunes pousses est efficace contre
la diarrhée. Ses fruits, comestibles, servaient à la fabrication d'une liqueur
de ménage, dite « liqueur des fenêtres » parce que la fiole où, dans l'alcool,
macéraient les micocoules, était accrochée quarante jours à la fenêtre la plus
ensoleillée. Elle était dégustée la nuit de Noël, après le gros souper. On
l'appelait aussi « sauve chrétien », ce qui dit clairement les vertus lui
prêtait. L'écorce servait au tannage des peaux. Avec la racine, on pouvait
teindre laine et soie en jaune foncé. Le bois au grain très fin se prêtait à la
sculpture et à l'ébénisterie. Mais l'intérêt le plus remarquable de cet arbre est dans ses branches à la fois
souples et résistantes : on peut les plier, avec une courbure harmonieuse sans
qu'elles se rompent. Les tonneliers s'en servaient donc pour cercler les
tonneaux ;
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on en faisait aussi des cannes à pêche, des gaules pour les fruits,
des échalas pour les vignes, des brancards de cabriolets, des bâtons de chaise à
porteurs.
Leur utilisation la plus spectaculaire était cependant la fabrication
de fourches à trois dents d'un seul tenant et celle de fouets. Il fallait
quatorze ans de patient travail dans de véritables « champs à fourches » pour
obtenir ces outils, légers et parfaits pour le dépiquage du blé sur
l'aire. Sauve, dans les Pyrénées Orientales s'en était fait une spécialité.
Toujours dans les Pyrénées Orientales, Sorède a été, à partir de 1900, le centre
de fabrication de longs fouets de cochers, de cravaches pour les cavaliers,
véritables œuvres d'art où l'on tressait les branches de micocoulier après une
savante préparation. Certes, « l'utilité » du micocoulier était liée surtout au
monde d'autrefois : des tonneaux, des cabriolets, sans parler des chaises à
porteurs... Et puis, de nos jours, on trouve tant de liqueurs et de bonbons sur
le marché !
À Vacqueyras, dans la cour de l'école, s'élève un micocoulier au
tronc puissant, un peu coincé cependant par une construction nouvelle. Qui sait
si les enfants qui s'ébattent à son ombre savent encore qu'il donne des fruits
appelés ici « paparo » que leurs grands parents suçaient comme des friandises
quand ils avaient leur âge ? Alors va-t-on oublier le micocoulier ? Bien au
contraire, le micocoulier est de retour. Si l'histoire n'était pas triste malgré
tout, on pourrait même dire que l'heure de la revanche a sonné pour lui : car
les platanes sont malades, ils dépérissent irrémédiablement et les micocouliers
reprennent leur place. Les anciens de Caromb qui se souviennent que dans leur
jeunesse, c'étaient les micocouliers qui ombrageaient le cours avant d'être
remplacés par les platanes, se réjouissent de les voir revenir.
À Sorède, on
a repris la fabrication des fouets. Fera-t-on encore de « la liqueur des
fenêtres » ?
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Antoinette Gilbert intercom’ no 7 – revue
d’information de la communauté Ventoux-Comtat venaissin
Note: Les informations sont tirées de : « Le micocoulier»
de Lionel Hignard. Collection : le Nom de l'arbre. Éditions Actes
Sud
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NATURE
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